Le chiot qui mordille : comprendre et gérer ce comportement

Le mordillement chez le chiot est souvent considéré, à tort, comme un comportement anormal ou répréhensible. En réalité, il s’agit d’une expression normale du comportement exploratoire. Ce dernier devient gênant seulement lorsqu’il est mal interprété ou mal géré par l’humain. Inutile donc de vouloir le sanctionner : le mordillement est un jeu d’apprentissage qui aide le chiot à découvrir le monde.
Le mordillement chez le chiot : un comportement exploratoire naturel
La prise en gueule : essentielle pour découvrir le monde
Contrairement aux primates, les canidés ne peuvent pas saisir d’objets avec leurs pattes. Ils se servent exclusivement de leur gueule pour attraper et manipuler un outil, un jouet ou un aliment. Cette exploration orale commence dès la naissance (réflexe de fouissement, de tétée, orientation vers la mamelle). Elle se met en place de façon volontaire au moment du sevrage vers des éléments solides, bien avant l’acquisition d’une motricité parfaite.
C’est cette prise en gueule qui permet au chiot d’appréhender toute nouvelle texture, odeur ou nouveau goût ou substrat et de mémoriser des informations. Le mordillement est donc une étape clé de son développement sensoriel et cognitif.
Mordiller, mâchouiller et jouer pour socialiser
Dès le début de la période de socialisation, vers l’âge de trois semaines à un mois, lorsque s’engagent les premiers jeux sociaux, les chiots prennent en gueule tous les objets à leur portée. Ils empoignent également leurs congénères pour jouer. Ils se saisissent et se renversent, se coursent et s’attrapent avec les dents. Parfois un chiot crie, l’autre lâche et le jeu recommence. Le jeu est essentiel pour la structuration émotionnelle de l’animal. Il est inscrit dans son répertoire comportemental et ne doit pas être empêché. Au cours de cette période de socialisation, c’est par le jeu, et en particulier les jeux de tiraillements, que les chiots apprennent à s’ajuster et à se côtoyer amicalement.
Ces interactions ludiques sont indispensables à la structuration émotionnelle et à l’équilibre du futur chien. Elles apprennent au chiot à ajuster la pression de sa mâchoire et à interagir de manière amicale.
L’inhibition à la morsure
Le rôle de la mère dans l’inhibition à la morsure reste encore incertain. Les chiots semblent peu stressés lors de ses absences et il n’est pas certain que cet autocontrôle soit réellement inculqué par la chienne. A ce jour, aucune étude n’a démontré qu’une portée séparée de la mère avant l’âge de huit semaines mordillait davantage qu’une autre restée plus longtemps à son contact.
Par ailleurs, des travaux récents ont montré que les chiots présentant des mordillements excessifs n’avaient pas plus de chance de devenir des adultes à risque de morsure accrue ou plus grave, que les chiots qui mordillaient moins. Le mordillement chez le chiot est une phase normale, non un problème de comportement à corriger.

Mordillement : des différences individuelles
Des chiots plus actifs que d’autres
Chaque chiot possède un tempérament propre. Dans une même fratrie, certains sont plus vifs, curieux et intrépides : leur comportement exploratoire est plus intense et ils mordillent davantage. D’autres au contraire mordillent peu, sont plus calmes, timides ou réservés. Ou tout simplement moins curieux. Ces différences de comportement relèvent de facteurs génétiques, non d’un manque d’éducation ou d’un défaut d’apprentissage de la mère-chien.
Le mordillement ne prédit pas l’agressivité
Un chiot qui détruit un objet ne manifeste pas d’agressivité et n’est pas synonyme de dangerosité future. Il cherche à comprendre ce qu’il manipule et à en découvrir les caractéristiques. Cette exploration contribue à l’enrichissement mental du jeune chien et participe à son bon développement cognitif.
Démystifier les idées reçues sur le mordillement
Le chiot qui mordille ne cherche pas à dominer
Lorsqu’un chiot mordille les mains ou les vêtements, il ne cherche ni à nuire ni à s’imposer. Il n’a pas conscience d’abimer nos affaires et ignore la fragilité et la sensibilité de notre peau. Comme nous crions et agitons les mains, il interprète notre gestuelle comme une invitation au jeu. Ce comportement n’a aucune visée agressive ou hiérarchique : c’est du jeu. Derrière ce jeu, il y a une réelle demande d’interaction sociale et amicale.
Il n’existe alors aucune compétition. Aucun des deux protagonistes ne cherche à dominer l’autre, ni à gagner la partie. Attribuer au chien un caractère « dominant » relève d’un barbarisme éthologique et d’une idée fausse encore trop largement répandue.
Pourquoi il ne faut pas punir un chiot qui mordille
Punir un chiot qui mordille revient à sanctionner un comportement naturel et nécessaire.
En voulant s’imposer comme « chef », l’humain risque de créer un climat de peur et de méfiance.
Une éducation basée sur la punition détériore la relation et peut favoriser de futures agressions. À l’inverse, une approche positive renforce la confiance et la communication entre le chiot et son propriétaire.

Canaliser positivement le mordillement
Proposer des objets adaptés
Le besoin de mordiller doit être redirigé vers des supports autorisés sans risque d’ingestion :
- Kong,
- corde à nœuds solides,
- tissus épais en coton,
- bâtons de bois,
- ballons en cuir crevés,
- bouteilles plastiques (sous surveillance),
- peluches qui couinent (imite un congénère qui gémit).
Satisfaire son besoin de mordillement crée un véritable épanouissement chez le chiot et donne l’occasion à son humain d’être à l’écoute de son développement mental.
Ces jouets stimulent le chiot, apaisent sa mâchoire et satisfont son besoin d’exploration.
Adapter l’environnement et l’activité du chiot
Il est important, en tant qu’éleveur, de détecter le tempérament du chiot et d’orienter son adoption vers une famille qui saura utiliser positivement ce caractère.
Un chiot qui mordille beaucoup a besoin d’activités sportives intensives, avec un propriétaire actif. On veillera à mettre le chiot en présence de nombreux congénères et à lui permettre de nombreuses interactions sociales de qualité. L’environnement familial doit être propice à satisfaire ce besoin d’exploration, qui sous-tend un besoin relationnel évident. Il faudra éviter de le laisser enfermé seul de nombreuses heures au risque qu’il ravage la maison.
Apprentissage continu : encourager la curiosité du chiot
C’est la curiosité qui pousse le chiot à s’engager dans des actions de saisie en gueule. Comme le petit enfant qui met tout à la bouche, le chiot doit pouvoir explorer oralement pour construire sa compréhension du monde. C’est indispensable à son développement cérébral. Il suffit de l’orienter vers des supports adaptés et d’éviter d’exposer nos mains et nos bras à ses dents. Le laisser dans un milieu sans stimulation qu’il connaît très vite par cœur appauvrit ses capacités adaptatives.
Le mordillement se réduit naturellement avec l’âge, à mesure que le chien acquiert confiance et maîtrise, laissant place à des interactions plus contrôlées. Accompagner cette phase avec patience, cohérence et bienveillance est la clé d’un apprentissage durable.
En résumé :
Le mordillement du chiot n’est ni une maladie ni un trouble du comportement. C’est un comportement inné inscrit dans son patrimoine génétique. Le mordillement appartient à son répertoire comportemental et participe à sa croissance physique, mentale et émotionnelle.
Le chiot apprend durant toute sa vie et en toute circonstance. Les maîtres doivent maintenir des activités éducatives riches au-delà de sa période de développement.
L’objectif n’est pas de le réprimer le mordillement chez le chiot, mais de l’optimiser et de le valoriser par des activités éducatives adaptées. Ainsi, le chiot apprend à canaliser son énergie tout en renforçant son lien avec l’humain.
